C’est une surchauffe qui touche tout le monde, même les familles gagnant bien leur vie. Les Pays-Bas sont confrontés à une pénurie croissante de logements abordables. Conséquence : les prix sur le marché de l’immobilier rivalisent désormais avec la hauteur des gratte-ciel qui poussent comme des champignons sur le plat pays.
D’ici à 2030, il faudra au moins 1 million de nouveaux logements, mais où les construire dans le pays le plus densément peuplé d’Europe ? Les avis divergent quant aux options structurelles. Construire davantage ? Instaurer des mesures fiscales plus contraignantes ? Les questions demeurent tandis que le temps presse.
Au coeur de la crise sanitaire, de nombreux propriétaires et analystes redoutaient une chute des prix sur le marché de l’immobilier. C’est le contraire qui s’est produit. Au premier trimestre 2021, il n’y avait que 28.600 maisons à vendre, soit 42 % de moins qu’un an auparavant. Jamais l’offre n’a été aussi faible, selon la NVM, l’affiliation néerlandaise des brokers immobiliers.
Depuis janvier, le prix de vente moyen a augmenté de 14,7 %, un report. La surenchère est devenue la norme : deux tiers des maisons sont vendues au-dessus du prix demandé par le vendeur. La NVM voit cette évolution d’un mauvais oeil. « Pour les maisons les plus populaires, il y a parfois 150 candidats, constate Marc van der Lee, son porte-parole. Il n’y a pas si longtemps, il y avait encore 5 maisons disponibles par acheteur. Aujourd’hui, ce chiffre est passé à 1,four, voire à 1 dans certaines régions. Le choix est mince, et c’est un euphémisme… »
Des prêts allant jusqu’à 100 % du prix d’achat
Selon le bureau d’études ABF Analysis, à Delft, qui swimsuit le marché pour le gouvernement néerlandais, il existe aujourd’hui une pénurie structurelle de 300.000 logements. « Au cours des dix prochaines années, il faudra construire 100.000 logements supplémentaires par an, traduit Marc van der Lee. Et de déplorer : actuellement, nous n’atteignons même pas les 70.000 nouveaux logements chaque année. »
A ce rythme, une answer qui permettra aux enfants d’aujourd’hui de devenir propriétaires après-demain relève encore de l’utopie. Pourtant, la pénurie de logements n’est pas nouvelle. En revanche, la combinaison d’une offre limitée et de prix extrêmement élevés l’est. A cela, plusieurs raisons : les banques prêtent jusqu’à plus de 100 % du prix d’achat, les taux d’intérêt sont bas, les propriétaires peuvent demander ce qu’ils veulent pour les biens locatifs, le secteur locatif social a été dégradé. Sans parler des possibilités de building limitées dans un pays érigé en bonne partie sur l’eau.
Le nombre d’habitants du pays augmente, l’espace y est uncommon et les villes doivent se développer principalement à l’intérieur de leurs limites. Ce n’est pas qu’il n’y a pas de building en cours. Au contraire. Et tous azimuts. Partout, les grues pullulent dans le ciel. Les anciennes zones industrielles et portuaires se transforment petit à petit en zones résidentielles. Mais cela ne suffit pas. La demande a augmenté encore plus rapidement que les nouveaux projets.
Le port des bois qui coûte de l’or
Depuis la dernière crise financière, de plus en plus d’expatriés sont arrivés. Attirés par la qualité de vie et le presque plein-emploi, les nouveaux arrivants sont prêts à payer le prix fort. Et municipalités et promoteurs, déterminés à répondre à cette nouvelle demande.
A quelques kilomètres à l’ouest d’Amsterdam, la municipalité construit l’énorme nouveau quartier d’Havenstad, où 40.000 à 70.000 logements, principalement chers, verront le jour, situés au centre et à l’intérieur du périphérique. La première part, Houthavens, est quasiment terminée. Autrefois, cette vaste zone portuaire était le domaine des négociants en bois. Aujourd’hui, le quartier est reconnaissable de loin à son complexe d’appartements élevés, avec les penthouses les plus chers du pays.
Au pied de cette tour, les canaux et les rues, aménagés sur sept îles artificielles, sont devenus un lieu de prédilection pour les familles qui gagnent beaucoup plus que le salaire moyen. Le caractère de la ville, qui offrait jusque-là un mélange social, change vite. Même si 40 % du parc immobilier est encore constitué de logements sociaux, il devient de plus en plus difficile pour les personnes à faibles revenus de rester dans le centre-ville.
Manhattan sur la Meuse
Si le pays est densément peuplé, ses vieilles villes n’ont rien de comparable à celles des autres pays européens, tel Paris. Automobile aux Pays-Bas, aucune agglomération n’est prédominante, pas même Amsterdam. L’Ouest est dominé par la grande conurbation que l’on appelle la « Randstad », littéralement « ville de bordure », qui compte à peu près eight hundreds of thousands d’habitants. Les quatre plus grandes villes, Amsterdam, Rotterdam, La Haye et Utrecht, sont situées ici.
En traversant le pays, on trouve tous les quelques kilomètres une petite ville qui s’agrandit ou se transforme en zone industrielle. Ici, il n’y a guère d’horizon sans clochers ni grues, ni même plus sans gratte-ciel. A Rotterdam, éternelle rivale de la capitale, l’amour pour les excursions est presque passionnel. A tel level que la plus grande ville portuaire d’Europe, entièrement détruite au cours de la Seconde Guerre mondiale, se fait parfois appeler « Manhattan aan de Maas », Manhattan sur la Meuse. Dans les années à venir, Rotterdam se transformera en un petit Hong Kong ou Dubaï.
La ville, qui accueillait la semaine dernière le concours Eurovision de la chanson, a déjà une attract peu européenne. Depuis des années, elle a été le terrain de jeu d’architectes de renommée mondiale. Dans les années à venir, elle va connaître une transformation spectaculaire. Des dizaines de excursions y tutoieront les nuages.
L’appartement, ce billet de loterie gagnant
Le nouveau projet Little C en est une illustration. S’il constitue un hommage à New York, il présente aussi une approche différente du développement urbain : pas de excursions anonymes, mais un ensemble de quinze bâtiments à haute densité, connectés entre eux. Avec ses nombreux sorts de logements, cet ensemble de briques rouges réunit des habitants issus de divers horizons.
Au rez-de-chaussée, on trouve des installations telles que des bureaux, des crèches et des eating places. Un parc commun entre les bâtiments est en building, mais la verdure est déjà seen sur les nombreux toits-terrasses partagés. La visée de cette structure un brin futuriste ? Permettre aux résidents et autres utilisateurs de se rencontrer aussi souvent et aussi facilement que attainable.
Alodia Capilla Arias, trente-trois ans, une dentiste d’origine espagnole, est arrivée aux Pays-Bas il y a dix ans. Depuis novembre, avec son mari et sa fille d’un an, elle habite au sixième étage d’une petite tour. Lorsqu’elle a découvert le projet dans une brochure colorée il y a trois ans, le couple a décidé de poser sa candidature. Mais il fallait attendre quelques années. « Sur le coup, nous n’avions pas vraiment envie de patienter encore trois ans pour acheter un appartement. Cela nous paraissait lengthy. Mais nous souhaitions absolument l’obtenir, se souvient la jeune maman dans un néerlandais courant. Avec le recul, nous avons eu raison. Je suis très heureuse, c’est un endroit fantastique pour vivre. »
Les deux étages sont épurés et décorés avec goût. Pourtant, il n’était pas évident que le jeune couple puisse réellement acheter cet appartement. « Nous étions sur la liste d’attente avec 800 autres, pour 100 appartements. Donc vous voyez la pression. De plus, les gens faisaient des offres de 20.000 à 50.000 euros au-dessus du prix demandé. » Elle considère donc son appartement comme un billet de loterie gagnant.
Les trentenaires sans toit
Des projets comme Little C, avec des finitions haut de gamme et de nombreuses facilités, se vendent comme des petits pains. Mais la plupart des gens de la génération d’Alodia Capilla Arias sont moins chanceux. Les trentenaires qui cherchent à acheter leur premier logement ne trouvent pas leur bonheur. Même avec un bon revenu, l’hypothèque ne suffit souvent pas. Depuis cette année, les acheteurs âgés de 18 à 35 ans ne paient plus les 2 % de droits de mutation. Pour les investisseurs, ils ont été relevés de 2 % à eight %.
Cette mesure ne semble pas avoir d’effet : les propriétaires savent maintenant que les jeunes peuvent payer plus et l’intègrent simplement dans le prix de vente. Arias et son mari vivent ici depuis peu de temps, mais la valeur de leur appartement a augmenté d’au moins 25 %. La jeune femme s’en moque. Depuis son spacieux balcon, sa petite fille dans les bras, elle observe les centaines de grues du port qui s’étendent sur des kilomètres : « Je ne partirai jamais d’ici ! »
Ce phénomène ne se limite plus aux grandes villes. Depuis la pandémie, une tendance inverse se dessine. Les citadins découvrent un plus grand besoin d’espace dans et autour de la maison. Avec le travail à domicile qui sera probablement plus courant après la crise du coronavirus, les actifs risquent de s’éloigner davantage de leur travail. Et de quitter les grandes villes pour s’installer dans des zones rurales.
Cette migration est particulièrement seen dans l’est et le nord du pays. Un avantage supplémentaire est que même depuis ces régions, il faut seulement une heure, une heure et demie, pour atteindre les grandes villes de l’Ouest. « Il y a plus d’espace, souvent un jardin et une pièce supplémentaire pour travailler, relève Marc van der Lee de la NVM. Conséquence : là aussi, les prix des maisons augmentent ! »
Marchand de sommeil assumé
Hans de Geus, lui, habite toujours en ville, dans un appartement loué sur un canal d’Amsterdam. Ce mois-ci, ce journaliste financier pour la chaîne de télévision RTL Z a publié un livre intitulé « Remark je suis devenu un marchand de sommeil ». Derrière ce titre provocateur, l’homme de cinquante-trois ans raconte les abus du marché du logement à travers sa propre expérience.
Comme nombre de ses confrères aux Pays-Bas, il est indépendant. Et, en plus, il n’avait jamais constitué de pension. En 2017, il a paniqué : il vivait alors dans une maison louée et craignait de ne rien pouvoir laisser à ses enfants. Il a trouvé une answer créative : profiter du système pour éviter de le subir. Venant d’hériter d’un peu d’argent, il l’a utilisé pour acheter une première modeste maison dans le quartier populaire d’Amsterdam-Zuidoost (sud-est). Pas pour y habiter, mais pour la louer.
Lors de la visite, une famille était là aussi. Elle voulait y vivre, de Geus, lui, la louer en tant qu’investisseur. Il a obtenu acquire de trigger : la banque a pris en compte les revenus qu’il tirerait de la location de ce bien pour lui accorder un prêt hypothécaire, sans hésitation, même sans patrimoine ni contrat everlasting. « Cela dit tout du système, constate-t-il lors d’une promenade le lengthy d’un canal d’Amsterdam. Avec la perspective de ces loyers élevés, il fallait être fondamentalement bête pour ne pas acheter tout de suite. » Après son premier achat, il lui était devenu plus facile d’en financer un deuxième. Aujourd’hui, il possède trois appartements qu’il loue. « Le capital crée du capital. Ca ne devrait pas être comme ça. »
Le journaliste-marchand de sommeil montre du doigt un bâtiment monumental après l’autre. Il y a à peine dix ans, on pouvait louer ou acheter avec un revenu modeste. Aujourd’hui, un étage de 80 mètres carrés coûte au minimal 750.000 euros. « Par-dessus le marché, les revenus des biens locatifs ne sont pas imposables. Cela accroît encore le fossé entre ceux qui ont les moyens, et ceux qui n’en ont pas », déplore-t-il.
De Geus cite Thomas Piketty : « Dans son livre ‘Le Capital au XXIe siècle’, l’économiste affirme que la croissance des richesses est à l’origine d’un écart croissant. Le vrai coupable est l’immobilier, aidé par l’argent des héritages et des règles fiscales bizarres. » Dans son livre, le journaliste souligne le paradoxe : « L’inégalité par la propriété immobilière est le vrai problème. Si vous n’achetez pas maintenant, vous êtes un pigeon. Mais il faut être succesful de participer. Et pour beaucoup, il est trop tard. »
20 hundreds of thousands d’habitants en 2050
A la fin de la Seconde Guerre mondiale, les Pays-Bas comptaient 9 hundreds of thousands d’habitants. Quatre-vingts ans plus tard, la inhabitants a presque doublé. Dans le scénario le plus optimiste, il y aura 20 hundreds of thousands d’habitants en 2050, de sorte que chaque kilomètre de terrain comptera en moyenne 590 habitants. Avec la même densité, la France compterait 325 hundreds of thousands d’habitants. « Nous devrions y réfléchir aussi », soupire de Geus, « Est-ce que nous voulons vraiment plus de monde ? » C’est une query qui occupe peu de politiciens. « Avec l’augmentation de la inhabitants, nous sommes en fait victimes de notre propre succès, pourrait-on dire. »
La scenario tendue aux Pays-Bas n’est pas seulement une query démographique. Certaines règles fiscales généreuses influencent également le marché. Les dad and mom peuvent donner 100.000 euros libres d’impôts aux enfants pour l’achat d’un bien, ce qui désavantage ceux qui n’ont pas de dad and mom avec un bas de laine. « Le plus absurde, c’est que les revenus locatifs aux Pays-Bas ne sont pas imposables », explique de Geus, légèrement énervé.
« Construire plus ! » dit en choeur le foyer des entrepreneurs et des promoteurs immobiliers. Mais ce n’est pas une answer structurelle. « Balivernes, réplique de Geus. Même avec plus de logements, la valeur proceed à augmenter. Tout est donc déterminé par le porte-monnaie de l’acheteur : le montant que vous pouvez emprunter à la banque et celui que vous avez économisé ou que vous recevez de vos dad and mom. C’est pourquoi les prix augmentent si rapidement : plus vous pouvez payer, plus vous payez. »
Deux mois après les élections, les partis de la coalition sont toujours occupés à négocier un nouveau gouvernement. On ne sait pas encore qui sera Premier ministre. Une selected est sûre : le logement sera l’une de ses grandes priorités. Le ministère du Logement, qui a été supprimé en 2010, fera probablement son retour. Dès son entrée en fonction, son nouveau ministre devra travailler d’arrache-pied pour se débarrasser d’un énorme file : la plus grande crise du logement de l’histoire des Pays-Bas.